L'auteur

Titulaire d'un Doctorat en philosophie et d'une maîtrise en histoire, l'auteur est restée fidèle à ses deux «initiateurs» en philosophie, Nietzsche et Kierkegaard, mais admire tout autant Spinoza, Russell, Arendt...
Marie-Pierre Fiorentino

jeudi 26 septembre 2019

Paradoxes du pardon.

Mon ennemi me le demanderait-il que je pourrais peut-être lui pardonner. Il n’a fait que brandir les atours de la guerre : ses mensonges comme armes et sa méfiance en bouclier. N’ayant rien d’autre à attendre de lui, le pardon ne me coûtera guère.

Mais toi, mon ami, pourrais-je te pardonner si tu uses de tels procédés à mon égard ? Ne trouverais-tu pas l’assurance dans la profondeur de notre complicité pour éprouver le besoin de te protéger ? Se protège-t-on d’un ami ? A moins que tu ne saches l’être pleinement et que la méfiance que l’amitié normalement détruit ne soit qu’assoupie en toi. 
Tu deviendrais, mon ami, pire que mon ennemi en m’ôtant la possibilité de te pardonner. Car si le pardon doit avoir un sens, il ne pourrait en avoir pour ton comportement insensé. Et puis le pardon est un don de soi. Or ne me serais-je pas déjà offert à toi en te donnant ma foi ? 
A moins que l’on n’ait rien à se pardonner entre amis mais tout à comprendre.

Quant à toi, mon amour, si tu te méfies et me mens, te traiterais-je en ennemi ou en ami ? Le pardon ne laisserait-il pas entre nous son indélébile relent de vassalité ? Car l’on est toujours redevable à celui qui nous a pardonné, attaché à celui que l’on a pardonné – que l’on se sent moralement grand grâce à lui ! Ces rôles pour nous me déplairaient.
Et puis c’est la paix que je cherchais dans l’amour de toi. 
Alors ne pas te pardonner pour mieux te comprendre ? Je ne me comprends déjà que trop bien dans cette agitation de paradoxes. La lucidité va bien au-delà du pardon.